Abu Mohammed al-Jolani : L’évolution d’un chef de guerre syrien (FR)
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Chronologie de son parcours en anglais
Son parcours
Ahmed al-Sharaa est plus connu sous son nom de guerre Abu Mohammed al-Jolani. Ce nom provient de sa région natale, le Golan (ou Jolan en arabe). Suite à l’invasion israélienne du plateau du Golan pendant la guerre des Six Jours en 1967, sa famille quitte la ville de Fiq pour l’Arabie Saoudite. Le père d’Ahmed, Hussein Ali al-Sharaa, diplômé en économie à l’université de Bagdad, travaille comme ingénieur pétrolier à Riyad. Ahmed y naît en 1982. À l’âge de 7 ans, sa famille retourne vivre à Damas, en Syrie.
Son militantisme commence en 2000, suite à la Seconde Intifada (révolte en arabe) pendant laquelle la population palestinienne se révolte contre la politique israélienne d’occupation. En 2003, lorsque l’armée américaine envahit l’Irak, Ahmed al-Sharaa rejoint Jama’at al-Tawhid wal-Jihad dirigé par Abou Musab al-Zarqawi en Irak, qui devient Al-Qaïda en Irak en 2004. Il est emprisonné au camp Bucca, une énorme prison américaine, en 2006. Il y rencontrera Abou Bakr al-Baghdadi. Il sort en 2008 ou 2009 et prend le nom de guerre Abou Mohammed al-Jolani. Il devient responsable des opérations de l’État islamique en Irak (EII) à Ninive.
En 2011, al-Baghdadi l’envoie en Syrie où il fonde Jabhat al-Nosra. Deux ans plus tard, l’émir de l’État islamique veut faire fusionner al-Nosra et l’État islamique en Irak pour créer l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL), mais al-Jolani refuse et prête allégeance à Ayman al-Zawahiri. Cette décision a été, en partie, motivée par la volonté d’al-Baghdadi de faire assassiner des chefs rebelles syriens. L’année suivante, le médiateur entre al-Nosra et Al-Qaïda est assassiné dans un attentat-suicide par l’EIIL. Cela marque le début d’une guerre ouverte entre al-Nosra et l’État islamique.
En 2016, il rompt les liens avec Al-Qaïda et change le nom de son groupe en Front Fatah al-Cham. Il a la volonté de se fondre dans les groupes rebelles syriens et de se concentrer sur la révolution syrienne, tout en cherchant à améliorer l’image de son groupe pour ôter l’étiquette de « groupe terroriste ». Le 28 janvier 2017, son groupe fusionne avec 5 autres pour former Hayat Tahrir al-Cham (HTS). Il prend la direction de HTS en octobre de la même année, après la démission d’Abou Jaber. Entre-temps, le Département d’État américain propose 10 millions de dollars pour toute information permettant de le capturer. Cette récompense est annulée le 20 décembre 2024 après sa rencontre avec une délégation américaine.
HTS renverse le régime de Bachar al-Assad en l’espace de 12 jours et prend Damas le 8 décembre 2024. Al-Jolani devient le numéro 1 en Syrie, mais comment ont évolué ses intentions pour la Syrie et quelle est son idéologie actuelle ?
Ses volontés
Interviewé en 2014 par Al-Jazeera, il déclare que la Syrie doit être gouvernée par leur interprétation de la loi islamique (la charia) et que les minorités chrétiennes, druzes ou alaouites ne seraient pas prises en compte. Dix ans après, il tient un discours plus poli. Il affirme que les minorités ethniques seront protégées et auront leur place dans la société.
Lorsqu’on le questionne sur le régime des Talibans, il répond que ce sont deux sociétés complètement différentes, avec des cultures et des manières de penser différentes, et que les Afghans sont une société tribale où la tribu a un rôle important au pouvoir. Concernant l’éducation des femmes, il explique que son groupe dirigeait la province d’Idlib ces dernières années, et que les femmes y représentent plus de 60% des étudiants.
Sur le sujet de l’alcool, il répond que c’est un comité de législation qui se chargera d’établir une constitution et qui décidera. Enfin, sur le sujet du port du voile, il répond qu’il y a des problèmes bien plus importants pour la Syrie, comme la reconstruction des infrastructures, des hôpitaux, des commerces, et le retour des exilés.
Il a déclaré que l’élaboration d’une constitution et l’organisation de possibles élections pourraient prendre quatre ans et a invité toutes les factions armées à rendre les armes pour dissoudre tous les bataillons, y compris le sien, HTS.
Ahmed al-Sharaa, qui ne veut plus se faire appeler par sa kounia, a fait énormément parler de lui depuis qu’il est devenu le leader syrien. Certains le voient comme un agent du Mossad, ayant combattu le Hezbollah et les Iraniens tout en renversant un régime ennemi d’Israël. D’autres le considèrent comme la marionnette d’Erdogan et pensent qu’il pourrait régler le problème avec les Kurdes. Est-il un chef djihadiste grimé en homme politique, comme le pensent certains, ou un révolutionnaire ambitieux et repenti de ses allégeances passées ? Et surtout, est-il sincère dans ses propos en faveur d’une Syrie plus démocratique ? Seuls les mois et années à venir nous le diront, il est donc important de garder un œil attentif sur la Syrie.
Idlib Syrie par Osama Naser